Bzz Bzz, l’espion Quivoitou
Bonjour, je suis Bzz Bzz, la mouche, l’espion Quivoitou. Ma planque préférée, c’est le coin gauche du plafond à l’entrée du bus, ligne S. J’adore les heures de pointe, là où tout le monde se bouscule, où la sueur aigre monte à mes narines palpitantes. Aujourd’hui j’ai repéré un type bizarre dont l’odeur forte de fatigue et d’énervement m’a attirée. Il ressemblait à un héron emmanché d’un long cou comme dans une fable de La Fontaine. Eh oui, ne croyez pas que je suis une simple mouche que l’on qualifie de mouche à m… et que l’on écrase d’un air dégouté. Je suis une fine mouche, lettrée, l’espion Quivoitou. Bref notre quidam, loin de côtoyer une rivière, était agglutiné aux autres voyageurs et il se mit en colère contre son voisin qui le bousculait. De plus en plus intéressée, je décidai de me percher sur son chapeau mou et informe pour l’avoir à l’œil. Bien m’en prit car ce couvre-chef se révéla aussi confortable qu’un matelas à mémoire de forme. Mon humain porteur finit par se précipiter sur une banquette qui venait de se libérer. Douillettement installée, je m’endormis.
Beaucoup plus tard, je me réveillai brusquement quand il se leva pour sortir de l’autobus.
Afin d’en apprendre plus, j’entrepris de ne pas bouger du chapeau. Nous arrivâmes donc cour de Rome, devant la gare Saint-Lazare. Là, un camarade l’aborda, beaucoup mieux habillé, sans signe distinctif et sans odeur attirante. Il lui parla de bouton. Je commençai à me méfier : mon porteur serait-il également porteur de boutons contagieux ? Je n’avais pas envie de me transformer en mouche coccinelle. Ils avaient l’air de bien se connaître. Peut-être même un peu trop car quand l’autre porta la main à l’encolure de mon héron par-dessous son par-dessus, c’en fut trop pour moi, la mouche Bzz Bzz, l’espion Quivoitou. Je suis une mouche pudique et d’un coup d’aile je décidai de regagner ma ligne d’autobus S afin de reprendre mon travail d’espion.
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