Description Fine D'Un Tableau... par Christine

Nous sommes devant le tableau de Georges de la Tour intitulé " Le Tricheur à l'as de carreau". C'est une huile sur toile de 1636 environ, de 1 mètre par 1,40 environ.

Cette scène de genre est cadrée de près sur quatre personnages se tenant autour d'une table. Trois d'entre eux, assis, jouent aux cartes : un jeune homme, au premier plan à droite du tableau, assis devant la table, nous est présenté de profil ; un homme paraissant d'âge mûr et assis à gauche du tableau au bout de la table, nous tourne le dos mais tourne la tête vers le spectateur ; une femme richement parée est au centre du tableau assise derrière la table. Le quatrième personnage est une autre femme située debout à gauche de la première, manifestement une servante portant une bouteille et une coupe de vin.

L'ensemble du tableau est réalisé avec un camaïeu de tons de bruns plus ou moins clairs ou foncés, le fond étant sombre. La lumière vient de la gauche du tableau et fait naître des ombres et des clartés sur les visages et les objets. Le tout est réchauffé par un ocre rouge décliné sur les vêtements et accessoires.

La palette est restreinte mais riche de nuances qui animent la scène.

 

Revenons en détail sur chaque personnage. Mais disons tout de suite qu'on est frappé immédiatement par le jeu des regards qui s'échangent : il se passe quelque chose. La scène est un instant particulier de cette partie de carte !

 

Commençons par le personnage qui est au centre, la femme richement parée.

Elle est en pleine lumière. Sa robe de velours brun cousu d'or, aux larges manches à crevés, souligne la peau claire de sa gorge et de son cou orné d'un collier de perles. Ses cheveux lisses et ses pendentifs de perle encadrent son visage d'un ovale plein et parfait. La coiffure de tissu ocre rouge savamment agencée et empanachée est ornée d'une broche et bordée d'un rang de perles. Le front haut et lisse accroche la lumière, le nez droit et régulier surmonte une bouche petite aux lèvres charnues. Les yeux noirs surtout, levés obliquement vers le visage de la servante, semblent de porcelaine. Ce regard expressif dans un visage impassible interroge non seulement la servante mais aussi sa propriétaire et le spectateur que nous sommes.

Pour finir, la main gauche de cette dame, posée sur la table recouverte d'un drap beige, tient les cartes de son jeu, à côté de quelques pièces d'or. La main droite fait un geste qui pourrait être celui de prendre la coupe présentée par la servante, mais l'index tendu semble désigner l'homme de gauche. Elle porte un bracelet de perles à chaque poignet.

Le personnage de gauche, lui, nous tourne le dos, assis en bout de table. Le coude droit, qui nous est proche, appuyé sur la table, l'homme tient dans sa main les cartes de son jeu que nous voyons distinctement, du carreau. Par une torsion du buste et de la tête, dont le visage reste dans l'ombre, son regard se porte vers nous. Sa main gauche passée dans son dos saisit un as de carreau glissé avec un as de pique sous sa large ceinture noire.

Sa veste sobre, beige, passée sur une chemise blanche, est simplement ornée de rubans noirs attachés aux emmanchures. L'homme ne semble pas de haute condition, pas de bijoux, pas de coiffure sur ses cheveux courts et bouclés sans artifice. À noter qu'on ne voit pas tout de suite les pièces d'or dissimulées dans l'ombre de son coude posé sur la table.


Troisième personnage, celui de droite, assis devant la table. Il semble jeune, une ombre légère a été figurée au-dessus de sa lèvre supérieure et sur le bas de sa joue. Son visage de profil reçoit lui aussi la lumière. Son front lisse, son nez droit, sa bouche charnue, sa joue ronde, son riche costume lui donnent comme un air de famille avec la dame du centre. Il a le regard baissé mais ne semble pas regarder les cartes qu'il tient de ses deux mains, du pique à ce que nous pouvons voir. Il semble plutôt réfléchir. Ses cheveux abondants et savamment ondulés sont coiffés d'un béret rouge à grande plume d'autruche qu'il porte sur le côté droit de la tête.

Son gilet de soie est richement brodé et agrémenté de rubans rouges noués sous le haut col et aux emmanchures. De la chemise de lourd satin crème n'apparaît, juste devant nous, que la manche gauche, au-dessus d'une culotte rouge dont on ne voit que le haut du drapé. Il porte à chaque poignet un bracelet qui semble d'argent ciselé. Sur la table devant lui, plusieurs petits tas de pièces d'or.

 

Dernier personnage, non des moindres : la servante, debout derrière la table, entre le joueur de gauche et la dame au centre. Légèrement inclinée vers elle, elle tient dans sa main gauche une bouteille ventrue emmaillotée de ficelle à la manière des vins italiens. Dans la main droite elle présente une coupe à pied remplie d'un vin ambré.

Son visage de profil se découpe sur le fond sombre de la pièce et bien qu'il soit légèrement dans l'ombre il apparaît clairement. Son nez légèrement retroussé, ses lèvres serrées, ses cheveux invisibles sous un turban ocre doré enroulé autour de sa tête et orné d'un plumet, sa joue légèrement rosée, font ressortir son œil sombre dont le regard oblique ne se dirige pas vers l'un des personnages de la scène mais semble plutôt se perdre vers le spectateur que nous sommes, tout comme l'homme de gauche.

Elle est vêtue d'un bustier sombre passé sur une chemise blanche à motifs noirs légers, d'une jupe rouge, et porte à son poignet droit un bracelet de pierres rouges et de métal argenté.

 

Pour conclure insistons sur le mouvement qui se dégage de l'ensemble bien que les personnages ne soient pas en mouvement, cela du fait du jeu des regards croisés des personnages qui pourtant ne se rencontrent pas.

2023-02-09 jeudi

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