Odeurs d'Enfance... par Hug

La mémoire olfactive est chose étrange, fort déroutante et cette manière de dérouter est remarquable quand il s’agit du temps de l’enfance, les odeurs font un long voyage pour faire volutes à la lucarne.

Tiens ! là ! sous le crayon, les amandes grillées de la fête foraine me font justement fête aux papilles des souvenirs. Le carrousel tourne et mon cheval trotte tout doux au rythme du vilebrequin qui le guide à l’allure. Ma mère est là assise au bord du manège, ma tante (sa sœur) est à ses côtés. Je suis Bayard, Zorro, je suis l’Indien des plaines et deux paires d’yeux me dévorent à chaque passage sur la scène.

Plus tard, j’ai les parfums d’une salle de classe au collège qui m’enrobe, le propre de la rentrée, l’eau de Javel sans doute, la cire sur les tables, les chaises. Le tableau n’a pas servi, les craies n’ont pas laissé de poussière ni en surface, ni au pied, mon nez cherche, ne voit rien. J’ouvre ma trousse. Tout est neuf. La veille j’ai refait l’inventaire. C’est la gomme qui se fait remarquer, elle est jaune, translucide, son odeur est d’un synthétique enivrant.

J’ai l’âge de rendre service. Je vais à la cave. Je n’aime pas aller à la cave. J’ai peur d’aller à la cave. La terre battue vaguement humide est fraiche, elle rend une odeur qui fait se tordre mon nez. La cuve à fioul est à côté, elle pue comme un dessous de vieux camion. Je ne serai jamais caviste, c’est certain, je me le promets. Le goût du vin viendra bien plus tard.

 

Je suis plus grand. Mon père se met en affaire pour fabriquer de l’alcool de pommes. À l’automne, les fruits récoltés sont broyés, mis en cuves, couvercles posés simplement. Le temps fait fermant. Quand la pulpe et son jus se font cidre, un doux parfum, un peu piquant, s’échappe des cuves. J’approche les narines, une mousse teintée brune crépite joyeusement, intrigante chimie. J’aime l’odeur du cidre au petit et sa saveur à tout moment raisonnable.

2022.09.08 jeudi

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