Je suis gros,
obèse, tout en rondeurs. Je jalouse mes voisins comme le violon avec son corps
de rêve, fin, élégant, un physique de star.
Franchement,
qui m'a doté d'un corps aussi imposant que mon concertiste soit obligé de me
maintenir entre ses jambes, assis qui plus est, pour éviter que je bascule
comme un culbuto.
Mais... ne vous
fiez pas aux apparences, écoutez le son plaintif de mon voisin le violon, qui
pleure, qui hurle, qui grince des dents chaque fois que son bourreau lui
transperce les cordes vocales avec son archet, d'un geste plus ou moins leste.
On dirait qu'il agonise.
Franchement,
ses plaintes m'exaspèrent.
Alors que moi,
avec mon air de quelqu'un qui aurait besoin d'un régime sévère, lorsque
l'archet m'effleure, le monde s'arrête de tourner autour de moi.
Le son doux,
rond, mélodieux que je laisse échapper du plus profond de mon être vous
transporte, et vous oubliez tout.
Tout ne devient
que bonheur, grâce, silence autour de vous. Seules comptent les notes légères, harmonieuses,
aériennes qui s'élèvent au-dessus de vos têtes.
Je vous vois
lorsque vous fermez les yeux pour mieux apprécier les douces mélodies quand mes
cordes vibrent à l'unisson pour vous emporter dans mon monde, dans un monde,
dans un ailleurs....
Je vois votre
tête qui oscille de droite à gauche, lentement, pour battre la mesure, pour
suivre le rythme. Je vous observe.
Où êtes-vous ?
Volant dans le ciel parmi les oiseaux ? Sur un bateau qui vogue sur l'eau et se
laisse bercer par les vagues ? Au milieu d'une forêt ? Sur le sable du désert ?
Je me plais à
imaginer tout cela, je vous aime.
Voilà, moi,
Violoncelle, j'espère vous avoir convaincu de venir m'écouter la prochaine fois
que je serai proche de vous, oubliez vos préjugés, oubliez mon apparence, et lancez-vous.
Je saurai vous
reconnaître.
2025.04.17 jeu.
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vous vous nous nous