Des Faits, De La Science par Hug

 

Idée folle ! Un pique-nique sur la Lune ! Mais oui ! Et comment ! Justement comment ? va falloir y monter là-haut.

Je me souviens que, gamin, pour grimper aux fraisiers je me servais d’un escabeau. Pour les arbres plus hauts, comme les haricotiers, il y avait des branches bien pratiques pour prendre de l’altitude. Plus tard les sapins m’ont accueilli à leur pointe, me nommant vigie pour une traversée de tempête magistrale, ça gîtait fort et le nid-de-corbeau était bien exigu. Pas de vertige au ventre. J’avais fait mon école.

Cette fois c’est à l’échelle que je gravirai, par ces barreaux on se barre haut. Pas compliquée l’affaire.

J’ai d’abord préparé le panier, le ventre ne peut attendre. Ne pas oublier les douceurs que l’on savoure les fesses dans l’herbe fraiche, même si peu de chance de trouver mousse et pâquerettes tout là-bas. Ne pas oublier bouteille scintillant rubis quand le soleil l’embrase, pas plus que sel, tire-bouchon, couteau CHuiche, il serait ballote linotte d’avoir à faire plusieurs voyages.

Pour grimper à la Lune avec échelle il faut en avoir deux, des échelles évidemment et non des lunes. Le mode d’avancement est simple : monter jusqu’au dernier barreau de la première échelle, avec à l’épaule la seconde échelle ; installer cette dernière à la suite de la première ; s’engager et récupérer à l’épaule la première gravie ; recommencer ainsi jusqu’à atteindre le lieu du pique-nique.

Les premiers jours furent débordants d’allégresse, la Lune éclairait la mystérieuse nuit, et autant que de jour, la vue de la Terre donnait le tournis rien qu’à la voir tourner et partout la beauté répondait au beau. De jour en jour la nuit s’épaissit à mesure que la Lune perdait en clarté. La fatigue de l’ascension prenait l’ascendant tandis que la Lune se fit descendante. Les enchainements échelle-échelle poursuivaient avec un peu de lassitude. La Lune revint en entier, disparut à nouveau, revint encore. Le pain au fond du panier avait durci sans douceur, le voyage touchait à l’extatique.

Bien des cycles plus tard j’alunis, c’était dimanche, un bon jour pour pique-nique.

Installé au bord d’une mer sans eau, je cassais du pain la croûte, constatai avec tristesse que mon helvète canif ne disposait pas d’un ouvre-boite à sardines. La bouteille m’avait sauté des mains en voyant pointer à son goulot la mèche du tire-bouchon, elle se trouvait partie pour un tour de Lune.

La fatigue ici pesait moins. Devant moi ébaubi, la Terre se tenait belle, mon émotion lâchait la capsule, mes larmes flottaient autour de moi en constellations lacrymales. Je me surpris à fredonner « Au clair de la Terre, mon ami Pierrot… » lorsque je sentis une présence tout à mon côté. « C’est moi Pierrot, à ton service ! » Je repris « Au clair de la Terre, mon ami Pierrot, prête-moi un mouchoir pour moucher mon nez… »

2024.10.17 jeu.

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