Faire Une Soupe par Éric

Faire une soupe, ou ne pas faire une soupe, là est la question… j’ouvre le frigidaire, il est vide, rien dans le bac à légumes. Avec quoi vais-je faire une soupe de légumes si je n’ai pas de légumes ? Je ne vais quand même pas faire une soupe de pâtes et faire une soupe de légumes, sans légumes, j’ai beau être un peu alchimiste, je n’ai pas atteint un tel niveau de compétence. Et pourtant c’est ce dont j’ai envie. Me revient une phrase d’un célèbre humoriste, « Dis-moi ce dont tu as besoin, je t’expliquerai comment t’en passer ». Je décide de ne pas en rester là, le travail d’imagination que je pratique en atelier d’écriture devrait m’aider. Alors, je me pose, je respire et je visualise. Je m’imagine, éplucher les pommes de terre, et peler les carottes, préparer les poireaux. Je me vois verser de l’eau dans une casserole, découper les légumes et allumer le gaz. Soudain le téléphone sonne et me fait sortir de mon rêve éveillé. C’est une amie qui m’invite à diner, j’ai préparé une soupe de légumes, me dit-elle, aimerais-tu venir la partager avec moi ? Je reste coi. Est-ce ce qu’on appelle le pouvoir de l’intention, ou la synchronicité, peu importe, je lâche prise, j’adore les mystères, c’est ainsi que va la vie… plus mystérieuse que les mystères…

2024.01.11 jeudi

S’Attabler Chez Tavernier Bertrand, En Tricoter Les Toiles… par Éric

Que la fête commence me suis-je dit en posant le pied parterre en sortant de la voiture.

Une semaine de vacances à la montagne, me met en joie, je la préfère à un dimanche à la campagne, simplement parce que j’ai besoin de repos, d’une bonne recharge d’énergie.

En levant les yeux, j’aperçois les sommets majestueux éclairés de lumière qui me regardent.

Nous sommes des enfants gâtés me dis-je et nous n’en avons pas conscience.  Alors je décide de mener une guerre sans nom contre l’oubli et de sublimer dans mon esprit, ces magnifiques paysages.

La vie et rien d’autre, c’est ce que je veux vivre et le vivre vraiment. Ça commence aujourd’hui, pas besoin de laissez-passer, il est déjà tard alors je me lance dardar à l’assaut des pyramides étincelantes. Je redescendrai autour de minuit, dans la brume électrique.

2024.01.11 jeudi

Faire Une Soupe... par Pascale

Un samedi de novembre, après une troisième tasse de café, je décide d’aller au marché du centre-ville. Le porte-monnaie et le téléphone portable au fond du panier tressé, une écharpe colorée autour du cou, 700 mètres d’un pas alerte, me voilà arrivée.

Les cinq sens en éveil, je flâne d’étal en étal quand soudain un stand de légumes que je ne connais pas me stoppe net. Chaque variété joliment disposée, a son nom soigneusement calligraphié sur une étiquette :

Alouette, Charlotte, Monalisa, Rosabelle (pommes de terre) ;

Bleu de Solaise, Ténor (poireaux) ; Géante de Tilques, Rodelika (carottes) ; Passe-Partout (oignons) ; Milan frisé (choux).

Quels légumes achetés pour faire une soupe ? Je réfléchis, hésite puis me décide : « Un exemplaire de chaque, c’est possible ? »

« Oui. C’est original. » répond le maraîcher calligraphe.

Je lui règle mon achat légumier puis demande si je peux photographier chaque variété de l’étalage avec sa jolie étiquette. Il accepte.

De retour à l’appartement, j’installe délicatement les dix légumes sur la table de la cuisine puis consulte les photos du marché afin de mémoriser le lexique. Je m’adresse ensuite à chacun, en modulant son nom, ceci à plusieurs reprises de manière aléatoire.

Et la soupe ? Mon corps pivote à droite, ma main attrape le couteau à légumes dans le tiroir du petit meuble, prête au travail. Sauf que mes doigts se figent, incapables d’agir.

- Déshabiller Alouette, Charlotte, Monalisa et Rosabelle ;

- Raccourcir Bleu de Solaise et Ténor ;

- Frotter Géante de Tilques et Rodelika ;

- Dénuder Passe-Partout ;

- Scalper Milan Frisé ;

La recette de la soupe du jour est impensable, inenvisageable, inconcevable...

Mes doigts se relâchent, le couteau s’effondre sur le sol. Alors...

- Se lever direction la chambre ;

- Revenir à la cuisine avec pochette CANSON et boîte de pastels ;

- Déplacer, resserrer harmonieusement les modèles ;

- Observer chacun d’eux prendre la pose.

- Dessiner jusqu’au coucher du soleil.

- Remercier les modèles.

- Savourer Still live with vegetables.*

 

* Hommage à Frans Snyders (1579 - 1657)

Denicé, 19 janvier 2024

Les 10 Mots 2024 : "Bonjour, je m'appelle Liam" par Michèle

Bonjour,

je m’appelle Liam, l’anagramme de mail, prouesse du net où mes parents se sont rencontrés.

Coup de foudre, échappée belle et me voilà : pas de faux départ, depuis neuf mois que je m’encorde à mon placenta, je viens de naître.

Je perçois le collectif de la maternité qui s’affaire autour de moi.

Clac ! Des ciseaux me séparent de mon cordon ombilical.

On me soulève, je sens l’adrénaline monter en moi, je crie ! Des mains habiles (pas de place pour le hors-jeu) me manipulent. Je suis pesé, lavé, habillé.

Ma naissance, c’est mon premier match réussi, l’arrivée sans encombre à la vie.

Je suis fatigué, j’ai hâte d’aller aux oranges me ressourcer près de ma maman. Ça y est, délicatement on me couche contre elle, je retrouve son odeur, sa chaleur, je reconnais sa voix, les battements de son cœur. Elle me parle doucement, me caresse. Nous nous découvrons avec tendresse. Je suis son champion, désiré, admiré, protégé.

Mon mental s’apaise. Réchauffé, rassuré, je m’endors paisiblement.

2024-01-19 vendredi

Les 10 Mots 2024 : "Vous avez dit sport ?" par Michèle

 

Vous avez dit sport ?

Aller aux oranges me ressourcer ?

Avec joie

Mais courir après un ballon

Qu’il soit ovale ou rond

Très peu pour moi !

Les sports collectifs

Ne m’attirent pas.

 

M’encorder ?

Uniquement avec mes bras

Autour de ton cou accrochés

L’adrénaline des grands sommets

Ne me fait pas rêver.

Avec toi, pas de faux départ

Ni de hors-jeu,

Un mental à tout égard

Tant que l’on est deux.

 

Tenter une échappée ?

Une prouesse de champion ?

Nous n’avons rien à prouver,

Vivons au mieux notre passion.

2024-01-19 vendredi

Les 10 Mots 2024 : "La course à l'échalote" par Agnès

 

La course à l’échalote 

 

Vendredi 13, Black Friday, Soldes Monstres, Tout doit disparaitre, Arlette est prête, son caddie dans les starkings block, devant le Champion de son quartier, le starter marque la dernière minute, pas question de faux départs

Dans sa tête elle refait pour la dixième fois l’itinéraire : aller aux oranges, sprinter vers la poissonnerie, esquiver la rôtisserie, grignoter 30 secondes par le raccourci de la presse, tenir le cap, négocier une échappée pour fuir Mme Pichon, la voisine bavarde et enfin, toute adrénaline bue, piler devant le rayon Bazar : Haro sur les promos !  Les fers à repasser, les bouilloires électriques, les services à thé, les bougies parfumées, les casques Wi-Fi, les tuyaux d’arrosage, les cocottes minutes, les vélos d’enfants, les nains de jardin, les paillassons, les ours en peluche, les housses plastique et les escabeaux. Arlette joute, marque à la culotte, souffle, mouille le maillot, tire, arrache, soulève, elle s’encorde avec le tuyau d’arrosage, met la cocotte sur la tête, une tasse à thé à chaque doigt, le casque entre les oreilles et monte ainsi harnachée sur le vélo d’enfant pour foncer vers la sortie, autour d’elle des clients applaudissent la prouesse et encouragent cet outsider surgi du Diable Vauvert, tout autour l’effort est collectif mais c’est chacun pour soi. Arlette fait le forcing, double Mme Pichon, pique un « Mentos » pour doper son mental, dénonce un client hors-jeu au vigile et déboule comme une balle sur les portiques. 

Au photo finish : Arlette en haut du podium empoche la victoire et la somme de ses courses !

(2024.01.19 vendredi)