À Ce Matin b. Une Suite… par Christine

 L'aube se lève, comme il y a quelques années quand la milice est venue frapper à ma porte. Mais ce matin le ciel est clair et la lumière dorée.

Un silence froid règne sur la ville en ruine. Les premiers vélos et trottinettes font leur apparition dans les rues calmes encombrées de débris. Plus de voitures, leur fabrication n'a pas été retenue comme nécessaire à la vie courante. Seules les estafettes des services publics parcourent maintenant la ville ou ce qui en reste. Elles ne vont pas tarder à entamer leurs rondes de distribution d'eau potable, de riz, de thé et d'huile. Pour le reste il faut aller dans les centres d'alimentation générale et présenter sa carte de travail. Tout le monde a droit au travail et chacun reçoit une carte, sauf les enfants scolarisés jusqu'à quinze ans. Toutes les activités sont reconnues mais la reconstruction et l'agriculture sont les mieux récompensées.

Le silence du matin est rassurant après ces années de vacarme incessant. On pourrait se croire au temps d'avant. Mais on n'entend plus ni radios ni télévisions. L'information est affichée sur de larges panneaux de bois devant lesquels les passants s'attardent. Des petits groupes se forment et les gens discutent entre eux, de tout et de rien, heureux de pouvoir échanger et s'entraider. Certains ont même des petites tables et jouent là un moment. Cette mode prend de l'ampleur et on ne sait où va s'arrêter l'imagination des organisateurs !

On n'y gagne rien bien sûr, en dehors d'une gloire locale qui ne dépasse pas le coin de la rue... Les gens se contentent de peu maintenant, pas question d'accumuler quelque bien que ce soit. La production s'est effondrée depuis la guerre. Tous les moyens de transport ont été détruits, les usines ont du mal à être reconstruites. On manque de tout, on manque de bras, on manque de cerveaux.

Il m'arrive de penser au monde d'avant, aux disparus, à Charlie. Comment en est-on arrivé là ? Mais à quoi bon ? Il faut laisser tout cela enfoui au fond de soi, faire comme si on pouvait oublier, et s'acharner à construire un monde nouveau.

2023.14.12 jeudi


 

 

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